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La mission sur les discriminations dans l’accès à l’emploi public, confiée par le Premier ministre à l’universitaire Yannick L’Horty, a présenté son état des lieux lundi 12 septembre au Conseil commun de la fonction publique. En contrepoint, Annick Girardin a rappelé les mesures qu’elle porte pour favoriser la diversité depuis son arrivée à la tête du ministère de la fonction publique.
Attachée, depuis sa nomination, à l’ouverture de la fonction publique à la diversité, Annick Girardin, ministre de la fonction publique, a fait le point, lundi 12 septembre au Conseil commun de la fonction publique (CCFP), après les prises de paroles syndicales, sur le chemin parcouru en matière de lutte contre les discriminations et sur ce qui reste à faire.
Depuis 2015, des actions en faveur de «l’égalité réelle» ont été votées, d’autres sont incluses dans le projet de loi égalité et citoyenneté en débat au Sénat du 4 au 6 octobre. « La lutte contre les discriminations est un sujet complexe qui doit être appréhendé à tous les niveaux de la chaîne, de l’orientation aux conditions de recrutement en passant par la variété des profils », a souligné la ministre.
Sensibiliser les jeunes dès la 3è
En amont, pour démocratiser l’orientation vers l’accès à la fonction publique, l’accent sera mis sur la sensibilisation et l’information des jeunes sur les métiers des fonctionnaires. La ministre a déposé deux amendements au projet de loi, l’un pour donner la possibilité, dès la classe de troisième, puis au lycée, de faire un stage dans une administration, le second pour mieux orienter les étudiants vers le service public.
Les chômeurs de moins de 28 ans des quartiers prioritaires, des zones de revitalisation rurale et d’outre-mer devraient également bénéficier d’un contrat en alternance pour présenter les concours de catégorie A et B.
Un 3e concours étendu
Ce Conseil commun de rentrée a été l’occasion de débattre du rôle de ces concours, car loin de contribuer aux discriminations, ils continueraient à garantir l’égalité d’accès. La ministre a proposé de rappeler systématiquement l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, selon lequel tous les citoyens doivent pouvoir bénéficier de l’accès aux emplois publics, dans tous les avis de concours ainsi qu’aux jurys.
Ceux-ci verront alterner un homme et une femme à leur présidence, dans l’esprit du protocole d’accord relatif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans la fonction publique signé en 2013.
L’accès au troisième concours devrait être étendu plus largement aux activités professionnelles associatives et à l’apprentissage. Ces mesures qui devraient intervenir avant la fin du quinquennat s’ajoutent à l’objectif de recrutement de 10 000 apprentis dans la fonction publique de l’Etat et au doublement du nombre de places dans les classes préparatoires intégrées, ce qui les portera à un millier pour des jeunes d’origine modeste.
Plan d’action systémique
Parlant d’un «plan d’action systémique», la ministre a en outre promis aux membres du CCFP des plans d’actions pour la diversité dans les écoles de service public – en lien avec la mission Rousselle qui a présenté une première étape de son rapport sur le sujet -, et dans les ministères, où une double labellisation diversité et égalité professionnelle entre les femmes et les hommes se met en place.
Sur ce thème, la mission confiée à la députée Françoise Descamps-Crosnier devrait rendre ses conclusions sur les écarts dans les avancements, les promotions et les rémunérations dans les trois versants de la fonction publique avant la fin de l’année.
Former les recruteurs
La ministre, qui prône des « mesures fortes » pour réduire les discriminations promet aussi un rapport biennal sur la lutte contre les discriminations et la collecte systématique des données relatives aux candidats aux concours pour assurer un suivi. Et parce que le maillon faible de l’accès diversifié aux fonctions publiques reste l’étape du recrutement, des tests de discrimination seront organisés chaque année et une formation pour lutter contre les préjugés et les stéréotypes généralisée en 2017 pour les recruteurs, notamment dans l’hospitalière et la territoriale, pointées comme défaillantes en matière de diversité par le rapport L’Horty.
Faire pression sur les employeurs
«Le rapport du chercheur Yannick L’Horty, très intéressant, montre qu’il manque des données objectives notamment pour la fonction publique territoriale. Ce qui nous amène à demander la création d’un observatoire », souligne Evelyne Boscheron, membre suppléante (CGT) du CCFP et auteure du rapport «Liberté, inégalité, fraternité – Intégrer l’égalité professionnelle dans la fonction publique territoriale » qui avait fait date lors de sa présentation en décembre 2005 au Conseil supérieur de la FPT.
Dix ans après, l’ancienne secrétaire fédérale reconnaît des avancées légales et réglementaires, mais pas toujours d’application dans les faits. « Les collectivités ont des obligations de fournir des données chiffrées en matière d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, mais elles réalisent très peu de rapports de situation comparée. Il faut des moyens de pression sur les employeurs qui ne répondent pas », suggère Evelyne Boscheron.
La préparation aux concours et la sensibilisation des plus jeunes et plus largement du grand public à la fonction publique sont en outre à renforcer, selon son organisation syndicale, pour aller vers plus de diversité.
La diversité bientôt au CSFPT
La diversité, thème cher à la ministre, devrait être pris en charge par la formation spécialisée numéro 5 du Conseil supérieur de la FPT, comme l’ont annoncé lors du Conseil commun son président Philippe Laurent et Bruno Collignon, président (FA-FPT) de cette instance interne au CSFPT. « La territoriale serait moins vertueuse dans la lutte contre les discriminations et en matière de diversité. J’ai proposé que ce thème fasse partie des trois abordés en 2017, de façon à prolonger les échanges du conseil commun. Nous allons inviter Yannick L’Horty pour analyser et voir comment améliorer ce qui peut l’être. Nous solliciterons aussi le Défenseur des droits, pour voir s’il a connaissance de ces situations », décrit Bruno Collignon qui sera présent vendredi matin, comme ses collègues des autres organisations syndicales, à une réunion sur l’égalité réelle dans la fonction publique en outre-mer.
Focus
La protection fonctionnelle améliorée
Sur les deux textes soumis à l’avis du CCFP, le texte sur la protection fonctionnelle des fonctionnaires et de leurs ayants droit, issu de la loi déontologie, a été voté à l’unanimité des membres du Conseil commun. Son examen avait été suspendu en juillet.
La nouvelle version ne mentionne plus de seuil selon la taille de la collectivité et n’indique plus de plafond pour les honoraires d’avocat – ce qui risquait de faire gonfler leurs honoraires – mais seulement un taux horaire qui ne devra pas être disproportionné. Et ce ne sont plus les assurances personnelles qui interviendront en premier ressort, mais l’assurance de la collectivité.
Un second texte, à l’initiative de la CGT, se proposait de réduire le nombre des membres du conseil commun. Par trop défavorable aux organisations syndicales minoritaires qui ont, jusqu’à présent pu conserver un siège dans cette instance paritaire consultative nationale, il a été retiré.